La météo n'est pas en notre faveur, une grosse
dépression ferme le golfe de Gascogne. Il nous faut vite rejoindre le cap
finistère espagnol sous peine de rester coincés aux Sables. Le vent nous fait
face, la descente au près serré est appuyée par nos quatre-vingts chevaux à
explosions.
Le bateau tape, beaucoup, mais le mal de mer
global s'efface doucement. Le "j'ai bien fait" remplace
progressivement le "je n'aurais pas dû". Les danseurs-dauphins sont
toujours là, toujours aussi libres et somptueux. Non présents à la dernière
édition, globicéphales et grands rorquals font leur entrée sur scène. Plus
imposants mais moins joueurs, ils passent au près du bateau d'un regard curieux
et s'en repartent comme si de rien. Les nuits d'étoiles continuent à caresser
l'esprit volage des quarts solitaires. Magie en mer.
A l'aube du troisième jour, le soleil révèle les
côtes espagnoles. Nous longeons à la voile les falaises triomphantes de
l'océan. La houle s'y brise et s'envole en coton de mer. Mais le temps presse,
le coup de vent est annoncé pour la nuit. Insouciantes, les voiles tirent
nonchalamment leur lourd fardeau en pied. Nous n'aurons pas le temps de passer
la pointe espagnole, escale anticipée à A Coruña. A 2h30 a.m. les pontons
espagnoles reçoivent nos amarres pour les deux jours de tempête annoncés.
A Coruña, La Corogne. Nous profitons de la courte
escale pour reprendre un rythme de vie terrien-condensé. Tout l'équipage se rue
sous la douche qui fait défaut depuis le départ. Quatre cent litres d'eau pour
six personnes. Piano.
Toilette accomplie et quart décommandé, nous
partons en exploration de la ville, à la conquête des dernières lueurs en cette
nuit de Dimanche hivernal. Viva España.
La nuit à l'abri des digues, loin du tambour
battant habituel, fait fleurir des visages plus en couleurs que les jours
précédents. L'envie de partager la douceur de vie à l'espagnole se fait sentir
dans tout l'équipage. Laissant le capitaine aux retrouvailles des amis en halte
forcée, nous fuyons notre maison-bateau. Un soleil pâle nous chérit toute la
journée. Nous pavanons en joie dans cette belle ville que le sort a voulu que
nous visitions.
Tapas et mojitos comblent d'allégresse cette
douce soirée en terrasse. Nous savourons notre dernière soirée à terre en
évitant les déboires Olonnais que nous payâmes chers.
Le soleil se lève, les amarres larguées, les
défenses rangées, la terre disparaît.
Malgré le vent de Sud, la lente descente des
terres ibériques suit son cours. La route est encore longue pour rejoindre les
Canaries. Avec le risque des coups de vent saisonniers, qui risqueraient de
nous mettre à mal, il serait judicieux d'aborder la traversée vers les îles
espagnoles les réservoirs pleins.
Nous arrivons à la tombée du jour dans la marina
de Cascais, belle ville pittoresque aux frontières de Lisbonne. Ravitaillement
effectué, nous déambulons dans les charmantes allées tortueuses de la vieille
ville, entre pavés et azulejos. Morues et autres spécialités font la première
partie d'un concert de jazz dans un sous-sol d'initiés. Improbable et
magnifique. Un instant qui fait que la vie doit être vécue.
Le soleil se lève, les amarres larguées, les
défenses rangées, la terre disparaît.
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